Son père, un médecin dermatologue, voulait en faire un diplomate, mais après ses études à l'école Saint-Louis-de-Gonzague, Télémaque préféra s'orienter vers le Centre d'Art de Port-au-Prince. Partant pour New York en 1957, il s'inscrivit à l'Art Students League, connut des mois difficiles, et vint tenter sa chance à Paris fin 1961. Sa participation au Salon Latino-Américain en 1962 le fit remarquer par Édouard Jaguer, qui l'introduisit dans le groupe surréaliste. Il y fut moins soutenu par André Breton que par les jeunes de son entourage (notamment José Pierre), sensibles à sa façon d'utiliser des éléments de bande dessinée, des graffitis, l'affiche Banania, pour créer des tableaux dépaysants. Hervé Télémaque est le seul représentant du Pop Art surréaliste. Au lieu d'imi-ter les artistes américains, il leur opposa son propre Style qu'Anne Tronche a défini comme : « la dissocia-tion des images à l'intérieur d'une structure-jeu ». En 1964, il organisa avec Rancillac l'exposition « Mytho-logies quotidiennes » au musée d'Art moderne de la Ville de Paris, et eut ses deux premières expositions personnelles, chez Mathias Fels à Paris et à la Hanover Gallery de Londres. Télémaque disait : «Je voudrais être une sorte d'indicateur des objets paradoxaux. » Il tenait pour un objet paradoxal, « objet comme doué d'une malice interne » : le slip, la gaine, la tente de camping, le coffre-fort, la chaussure de sport, les ciseaux, la canne, etc. Il créait l'insolite par l'intrusion d'un tel objet dans un ensemble : par exemple, dans Le poète rêve sa mort (1964), il montrait dans le ciel un téléphérique attaqué par une chaussure de ten-nis plus grande que lui. Petit Célibataire un peu nègre et assez joyeux (1964, Paris, musée national d'Art moderne), qui fit la couverture d'Art Press, est une tête d'homme à demi recouverte par un slip. Ses tableaux-assemblages semblaient une parodie du combine-painting de Rauschenberg, car il y avait une motivation ludique en lui. Il abandonna en 1966 la peinture à l'huile pour la peinture acrylique, et sa technique devint tridimensionnelle. Hervé Télémaque fit partie de la dernière Exposition internationale du surréalisme patronnée par André Breton en 1965, « L'Écart absolu » ; il collabora à la revue L'Archibras de ses disciples après la mort du poète ; il aida José Pierre à organiser l'exposition « Surréalisme » en 1970 au Moderna Museet de Stockholm ; il réalisa une série de cinq tableaux, Suite à Magritte, pour rendre hommage à celui-ci. Il appartient donc incontesta-blement au surréalisme d'après-guerre, bien que la série de ses Selles en 1978, celle de ses Maisons rurales en 1980, ne relèvent plus de son inspiration précédente. Toutefois, par moments, notamment dans ses collages avec des affiches de cinéma en 1991, ses dessins au fusain et au marc de café en 1994, il a retrouvé les accents qui font sa particula-rité dans le mouvement.

Hervé Télémaque

Né en 1937 à Port-au-Prince, Haiti. 

L'Âne et Sarko, Acrylique sur toile, 2003